L'art de vivre l'art

L'art a cette vertu pouvoir trouver des réponses esthétiques au quotidien. En prenant le temps de construire un projet qui se veut collectif, il est question de faire de l'Université de Nantes une institution singulière de savoirs, mais aussi de cultures.

Autour de la lecture du Manifeste pour un art de vivre produit par les Commissaires Anonymes, collectif de jeunes curateurs œuvrant dans l’art contemporain, se retrouvent les différents interviewés de ce documentaire.

Cet art de vivre, ou même « art à vivre », recoupe une évolution du projet de politique culturelle incarné notamment, pour la gouvernance, par Danielle Pailler et la Direction Culture et Initiatives. En commençant par poser une question simple : quelle place, et utilité, pour les arts et les cultures dans un campus de 40000 étudiants ? C’est bien la dimension poétique, en cherchant à « bousculer le quotidien », qui a tiré les premiers fils d’un projet au long cours repris par thématiques dans notre documentaire. Cette dimension poétique, en cherchant à infiltrer l’art un peu partout, s’est notamment vu lors d’une résidence d’année pour les 50 ans de l’Université de Nantes.

Le mythe du quotidien

L’arrivée de ce type de résidence était une première, un engagement fort et marquant avec l’équipe INTERIM et Marina Pirot en chef d’orchestre. Autour du mythe universitain – tous les savoirs pour toutes et tous – les intervenants recomposaient des objets artistiques transversaux, audacieux, parfois à la dérive pour saisir un instantané de ce qui contribuait à définir l’identité de l’Université de Nantes, depuis sa création en 1961 et sa reconnaissance progressive comme acteur de la cité. Déjà, les prémisses des termes « citoyenneté culturelle » et « démocratie culturelle » forgeaient un positionnement permettant de se projeter et de continuer à inventer. L’enjeu est toujours questionné : que faire pour inventer les cultures et les arts sur le campus ?

Le pôle étudiant sur écoute

Le Pôle Étudiant de l'Université de Nantes propose une fine programmation aux principes aventureux. Alexandre Labbé, programmateur du lieu, s'attache à proposer des chocs esthétiques, des inattendus pour faire de l'Université de Nantes une scène remarquée de la cité des Ducs.

Rendre accessible, déplacer le regard et fournir aux étudiants des propositions inattendues. L’inclusion de départ de l’art dans les cursus – avec les unités d’enseignement et de découverte – s’est progressivement retrouvée dans certaines filières, certaines disciplines. Quand les étudiants de l’IUT de la Fleuriaye créent une installation artistique associée à un artiste, Big Bang, ou que les étudiants en gestion prennent part à l’organisation de la Folle Journée, la culture offre d’autres perspectives : se sentir partie prenante et légitime dans un autre espace que celui des cours : la culture. C’est cette dynamique qui progressivement nuance le rapport entretenu à l’artiste. Là où on l’invitait pour la résidence INTERIM, on préfère désormais le faire contribuer, de sa posture et avec ses outils, à la mise en scène du quotidien.

Tous dans la marche de l'art

Autour du « manifeste pour un art de vivre coûte que coûte », les artistes et les chercheurs trouvent le sens des propositions artistiques sur les campus. Ceux du collectif et de l'invention : les propositions en vidéos.

D’où le fait de boucler la boucle, avec la lecture de ce manifeste, rapporté dans la Cité des Ducs par Louise Hochet, coordinatrice de la résidence « Art vivant Art utile ». Cette résidence, plus récente, exprime à elle seule quelques impondérables de la pratique artistique et culturelle à l’Université. En réunissant plusieurs disciplines, dont des artistes, architectes ou graphistes, on cherche ici moins le regard de l’artiste sur un lieu – le campus – que son diagnostic pour trouver des réponses esthétiques. Même si la poésie n’est jamais loin, il est davantage question ici de faire ensemble, partir des regards d’étudiants et de personnels et créer des propositions éphémères, comme un café, ou durable, comme une exposition. L’art serait avant tout la manière d’aborder des réalités bien différentes pour les parties prenantes, contributeurs aux perspectives culturelles de l’Université.

Un public actif, mais pas captif

À l’écriture de ces lignes, en 2016, l’année universitaire est marquée par de nouvelles élections. Et donc la culture sera en quelque sorte remise en jeu, pour définir de nouvelles modalités, pour composer un projet complexe, et composite. À l’écoute des parties prenantes du projet actuel, une dimension paraît essentielle : celle de la transmission, entre chercheurs, artistes, étudiants. Cette manière de pouvoir trouver des réponses esthétiques à un lieu commun, l’Université de Nantes. Aussi, que les pratiques artistiques puissent être ici et là, visibles, palpables, pour celles et ceux qui n’ont pas l’envie ou le temps de pratiquer ce que propose l’Université. Comme le rappelait à juste titre Caroline Urbain, chercheuse notamment en lien avec le restaurant social Pierre Landais, il ne faudrait pas non plus chercher midi à quatorze heures. Le public actif, c’est déjà le public qui se déplace pour partager ce que d’autres produisent, en atelier par exemple, avant même de chercher la contribution de toutes et tous aux ateliers proposés. En somme, un art de vivre qui, pour paraphraser Robert Filliou, rendra la vie plus intéressante que l’art.